- SAUTET (C.)
- SAUTET (C.)SAUTET CLAUDE (1924- )Cinéaste français né à Montrouge, Claude Sautet est venu à son métier par l’Institut des hautes études cinématographiques, mais après avoir tâté des arts décoratifs et pratiqué la critique musicale, après la guerre, dans le journal Combat . Encore aujourd’hui, la musique le passionne, et il garde un faible pour le jazz.Assistant de nombreux metteurs en scène à partir de 1948, il saura aussi s’imposer discrètement, grâce à sa culture littéraire et à son instinct du cinéma, comme le «sauveur» souvent anonyme de bien des scénarios en perdition. En 1960, sa patience est enfin récompensée: l’acteur Lino Ventura, devenant vedette, lui fait confier la mise en scène de Classe tous risques (dont il cosigne l’adaptation). Le succès peu attendu du film vaut à Sautet quantité de propositions pour des scénarios de même type (une histoire de truands qui échappe à la routine du genre). Il les refuse tous et se consacre à divers scénarios, tels ceux des premiers films de Jacques Deray (Symphonie pour un massacre ) et Marcel Ophüls (Peau de banane ). En 1964, toujours avec Ventura, il assure la réalisation d’un nouveau policier, L’Arme à gauche .Son premier film personnel sera un coup d’éclat: Les Choses de la vie (1969, prix Louis-Delluc). Il semble être dès lors en possession d’une écriture d’une belle solidité, fondée sur la connaissance à toute épreuve de la technique. Dès 1962, Jean-Pierre Melville avait été prophète en déclarant: «En dehors de son talent, je lui sais un courage tranquille [...]. Sautet le faux taciturne, inquiet autant que sûr de lui, attend d’être inspiré pour tourner. Mais quand il tourne, il met du cœur à l’ouvrage.»Chez ce cinéaste, la technique est en effet toujours au service de l’inspiration, et il est impossible de distinguer à la projection les scènes très préparées des scènes improvisées.Bien plus qu’une peinture de mœurs, Les Choses de la vie (adapté d’un court récit de Paul Guimard) vaut comme pénétration familière de la subjectivité d’un personnage, voire de quelques personnages, sans note forcée, jusqu’au point secret où la réalité d’une conscience touche au fantastique. Il y faut une sympathie spécifique, que Sautet, tout en s’attachant davantage à la critique sociale, a étendue à d’autres figures dans Max et les ferrailleurs (1970), César et Rosalie (1972), Vincent, François, Paul et les autres (1974), l’un de ses meilleurs films, et Mado (1976). Un certain pessimisme affleure dans ses peintures de l’amour et de l’amitié, mais il n’est ni gratuit ni envahissant. En outre, Sautet n’est pas seulement un excellent directeur d’acteurs: très attentif aux modulations secrètes qu’impliquent les éléments spectaculaires du cinéma (musique, photographie, mouvements d’appareil), il les intègre à son dessein avec un équilibre exact entre modernité et classicisme. L’accident des Choses de la vie , la crise cardiaque de Montand dans Vincent, François, Paul et les autres , tout comme la chute d’un gangster étonné dans la mer (L’Arme à gauche ) ne sont que les points forts de récits sans cesse vivants. Cinéaste exigeant, tenant de la présence constante, Sautet aura donc évolué tout naturellement vers un cinéma non psychologique, où les réactions les plus fortes sont saisies «en pleine pâte», délestées d’une trame préfabriquée ou d’une progression autre que lyrique. L’arrière-plan descriptif des milieux et des ambiances se fait de plus en plus elliptique et allusif: Une histoire simple , «histoire d’amour» que tout spectateur est invité à vivre à l’égard du personnage joué par Romy Schneider, marque un sommet (1978). Non sans courage, Sautet cherche alors un renouvellement: c’est Un mauvais fils (1980), avec Patrick Dewaere. Après Garçon! (1983), où il retrouve Yves Montand, Claude Sautet réalise Quelques Jours avec moi (1988), où l’exploration d’un milieu social — les notables de province — se double d’une satire incisive, et Un cœur en hiver (1992), avec Emmanuelle Béart.
Encyclopédie Universelle. 2012.